Le programme Formule 1 d’Alpine reçoit pour le moment le soutien du Comité de Direction du Groupe Renault pour la poursuite de ses activités en dépit du départ annoncé de Luca de Meo, son CEO. Le retrait de l’italien, ambassadeur du projet, ne change pas la donne, avec Flavio Briatore toujours aux manettes pour guider l’écurie vers de meilleurs jours. La nomination du prochain grand patron du Losange déterminera néanmoins la stratégie à long terme de cet engagement sportif.

Il y a certainement un léger soulagement dans les couloirs d’Enstone, à la lecture des dernières nouvelles partagées par la presse spécialisée. Le Comité de Direction souhaite en effet maintenir son soutien à l’engagement d’Alpine en Formule 1, à quelques mois d’un changement réglementaire majeur où le A fléché affiche de grandes ambitions. Flavio Briatore œuvre en coulisse pour s’assurer d’obtenir les conditions nécessaires à cette réussite.

La presse, The-Race.com en tête, évoque des rencontres régulières entre l’italien et la Direction du Losange, qui a pu rassurer quant à l’engagement de l’entreprise dans ce projet. Alpine peut ainsi continuer de travailler sereinement comme ce fut le cas jusque-là. Seule différence, Flavio Briatore doit soumettre les grandes décisions au comité de Direction et non plus seulement à Luca de Meo, en attendant de connaître son successeur. Un discours dont Pierre Gasly a pu prendre connaissance.

" Depuis le GP du Canada, j'ai eu tout le monde au téléphone, à savoir Luca et d'autres personnes impliquées au niveau du management ", explique le français, dont les propos sont relayés par L’Equipe. " J'avais besoin de confirmations concernant le projet dans lequel je suis embarqué depuis que j'ai rejoint Alpine. Ce sont des conversations normales au vu de la situation mais il n'y a aucune inquiétude par rapport à la suite. "

" J'ai les réponses nécessaires, mais vous pouvez comprendre que ce n'est pas quelque chose que je peux rendre public, je laisse l'équipe aller plus dans le détail. Pour moi, personnellement, c'était important d'avoir ces conversations, elles ont été très claires et tout est très clair dans ma tête, ce qui est le plus important. À Enstone, certaines personnes se posent des questions et c'est légitime mais Flavio a déjà donné des réponses et tout le monde sait où se situer, cela ne change rien sur le travail à faire ni sur l'évolution de l'équipe ", ajoute-t-il.

Le futur visage de l’écurie officielle Renault peut évoluer dans plusieurs directions, selon les décisions prises par le futur CEO du Groupe. Le Losange pourrait bien sûr envisager de cesser son activité mais aussi maintenir le programme ou rééquilibrer l’actionnariat. Les récents bénéfices annoncés par l’écurie Mercedes - 164 millions de livres avant impôts – témoignent de la bonne santé financière de la Formule 1.

Avec une forte valorisation des actifs et la génération de profits, Renault aurait tout intérêt à garder son écurie. Seule la nécessité de générer du cash ou un apport marketing contre-productif pourrait, à priori, remettre en cause cette approche. En tout cas, Flavio Briatore s’emploie pour convaincre la Direction du bien-fondé d’un engagement en Formule 1, comme l’explique Nico Rosberg.

" Quand j’étais chez Mercedes et que nous roulions à la dernière place, ils allaient presque nous débrancher tous les week-ends parce qu’ils payaient beaucoup d’argent et que c’est anti-marketing, c’est un marketing qui nuit à la marque Alpine et Renault si vous ne faites que rouler à la dernière place ", explique l’allemand. " En outre, dans un contexte difficile pour l’industrie automobile, […], la première chose que l’on réduit, c’est le budget marketing, et l’équipe de F1 fait partie du budget marketing. "

" Nous devons donc garder un œil sur ce point maintenant que nous avons une nouvelle direction, qu’elle soit pro-F1 ou contre la F1, mais la situation est difficile. Avec le plafond budgétaire et les primes, le coût peut être neutre, […], (Flavio) espère pouvoir convaincre le nouveau PDG, quel qu’il soit, qu’il continuera à faire vivre la F1. Est-ce qu’ils continueront à s’appeler Alpine parce qu’ils veulent promouvoir leur marque sportive ? C’est à discuter. Est-il préférable de s’appeler Renault ? ", se questionne Nico Rosberg.

" Ils sont à l’aube d’une meilleure année 2026 parce qu’ils vont avoir un groupe motopropulseur Mercedes. Je pense donc que le groupe Renault serait bien avisé d’attendre de voir ce qui se passera en 2026 et de prendre une décision après cela. Mais il n’est pas impossible qu’ils vendent l’équipe parce qu’il y a des acheteurs qui cherchent ", conclut-il.

À l’heure actuelle, deux candidats se détachent pour remplacer Luca de Meo : Maxime Picat et Denis Le Vot. Le premier cité est une option externe. Il vient tout juste de quitter Stellantis où il était considéré comme le numéro deux du groupe. Il dispose d’un certain intérêt pour le sport automobile. Il était notamment à l’initiative pour lancer Peugeot à Pikes Peak ou au Dakar, aux côtés de… Bruno Famin, aujourd’hui homme fort d’Alpine ! En 2013, il donnait d’ailleurs une interview intéressante au sujet de la compétition.

" J’ai ressenti beaucoup de satisfaction de redonner de la fierté, du plaisir, de l’envie de gagner aux équipes de Peugeot Sport, qui de manière évidente étaient encore marquées par l’arrêt de notre engagement en endurance ", expliquait-il au site Feline.cc, à propos de la victoire de Peugeot au Pikes Peak. " Au delà de Peugeot Sport, je sens dans l’ensemble de la Marque, du Groupe, du Réseau, de la fierté, de l’envie et du dynamisme, du ''ça y est, on gagne de nouveau'', et c’est exactement ce qu’on voulait faire ! "

" Le délai était très court : je me rappelle avoir été chez Peugeot Sport pour la première fois en novembre dernier, et avoir discuté avec Bruno Famin qui m’a dit ‘’Maxime, il faut qu’on fasse quelque chose’’. L’engagement d’un programme en endurance est très lourd en investissement, on n’était plus capables de le mener pour des raisons évidentes, et pourtant Peugeot Sport, c’est beaucoup de choses… Bruno a eu l’idée de me dire ‘’Et si on refaisait Pikes Peak ?’’, ce à quoi j’ai répondu ‘’On y va’’ ! Le lendemain je rencontrais pour la première fois les équipes de Peugeot Sport, et c’est là que je leur ai annoncé qu’on retournait à Pikes Peak… ", ajoute-t-il.

Maxime Picat apprécie la mise en avant d’un lien direct entre l’engagement sportif et la vie série. Les acteurs impliqués dans les différents programmes du groupe devront donc certainement convaincre sur ce point pour maintenir ou lancer de nouvelles initiatives.

" C’est vraiment le meilleur compromis possible lorsque vos équipes de sport sont à la pointe, gagnent des compétitions, et en même temps sont capables de faire des développements qui ont un impact sur la série. Ce lien, je le veux de plus en plus fort ", précisait Maxime Picat. " J’aime beaucoup l’esprit ‘’commando’’ des équipes de Peugeot Sport, qui sont capables de faire des merveilles aux quatre coins du monde, que ce soit sur un circuit au Mans, à 4000 mètres d’altitude aux Etats-Unis… "

Denis Le Vot a quant lui lancé Dacia au Dakar avec un programme bien ficelé et des résultats convaincants. Le français connaît bien l’importance du sport automobile dans l’ADN du Groupe Renault, il pourrait donc être un ambassadeur de tels projets. Ici aussi, un intérêt pour démontrer le lien avec la vie série sera certainement nécessaire, comme il l’affirmait à l’annonce du programme Rallye-Raid.

" Le Dakar est une course qui nous ressemble ", commentait Denis Le Vot, aujourd’hui CEO de Dacia. " Nous partageons des valeurs puisqu’il s’agit d’une aventure unique, humaine, sportive et technique, […], le Dakar est un challenge responsable. C’est un banc d’essais pour les nouveaux moteurs et les solutions engagées pour la mobilité bas carbone, […], notre ambition étant d’incarner l’avenir du moteur thermique à basses émissions. "

Il faudra encore se montrer patient pour découvrir l’identité du prochain CEO du Groupe Renault. Les noms cités semblent néanmoins afficher une certaine appétence pour le sport automobile, de quoi rassurer. En attendant, on appréciera la volonté affichée de l’actuelle Direction de soutenir la Formule 1 pour donner à Alpine toutes les chances de bien figurer dans les prochains mois. Des résultats forcément attendus et indispensables pour pérenniser ce programme…